Pourquoi on procrastine à écrire nos rapports

*Cet article est une adaptation écrite de l’épisode 40 du podcast.

Il y quelque temps, j’ai fait une publication sur mon compte Instagram qui a passablement fait réagir, mais dans le bon sens. 

En fait, dans cette publication, je parlais des raisons pour lesquelles on procrastine. Je ne pensais pas faire autant écho chez mes collègues et auprès de ceux qui me suivent.

En fait, de plus en plus, j’ai envie de parler de cet « envers du décor » qui n’est pas toujours rose et qui fait que, parfois (souvent), on doute de soi ou encore qu’on remet notre pratique et notre profession en question. Et je crois que la procrastination fait partie de ces irritants. 

C’est quoi la procrastination?

AVIS !!! Ce que je vous partage est le fruit de ma réflexion. Je ne suis pas non plus psychologue et dans certains cas, les patterns de procrastination peuvent être plus que de simples prétextes alors il ne faut pas hésiter à aller chercher l’aide professionnelle adéquate selon ta situation. 

En fait, c’est tout simplement le fait de reporter une ou plusieurs tâches à un moment ultérieur sous différents prétextes. Et c’est sur la deuxième partie de cette « définition » que je veux m’attarder… Les différents prétextes.

Je pense que ça fait juste partie de l’espèce humaine que d’avoir tendance à procrastiner. À la base, c’est normal de procrastiner parce que c’est la conséquence de réactions 100% naturelles qui sont pratiquement gravées dans notre code génétique.

S’il y a une chose que j’ai apprise dans les derniers temps, c’est que le problème ce n’est pas la procrastination en soi, mais ce que ça cache.

Est-ce que c’est mal de procrastiner?

En fait, c’est ni négatif ni positif. C’est tout simplement un comportement qui est la conséquence d’une pensée et c’est cette pensée, qui nous mène à procrastiner, qui suscite une émotion. 

De mon côté, je peux vivre deux émotions 100% opposées quand je procrastine et souvent, je les vis en simultané :

  • La culpabilité et l’angoisse : comme j’ai procrastiné une tâche, quand je m’y mets, c’est parce que je n’ai vraiment pas le choix. Ainsi, je travaille sous pression et ça me stresse parce que j’ai peur de ne pas avoir assez de temps pour tout compléter à temps. Et parce que ça me stress et que je me sens mal, je me tape sur la tête et j’me sens coupable parce que je me dis que je suis donc bien naïve de ne pas avoir commencé avant alors que pourtant c’est pas la première fois que je fais un rapport et que je sais le temps que ça me prend. Je me sens aussi coupable, parce que la fois précédente, quand ça m’était arrivé, je m’étais dit que la prochaine fois, j’allais m’y prendre d’avance et me prendre en main. Objectif que, lors que je constate que je suis encore dernière minute, j’ai lamentablement échoué à atteindre.

  • La fierté : je suis à peu près certaine que je ne suis pas la seule à dire (ou plutôt croire) que je performe mieux sous pression et ça suscite une certaine fierté. Parce que malgré tout le stress que je peux ressentir pendant que je « rush » la tâche que j’ai procrastinée, en bout de ligne, je suis quand même fière d’y être arrivée. Ça me montre que je peux continuer à procrastiner les prochaines fois parce que j’y arrive quand même. Cependant, depuis que j’ai compris plusieurs principes en lien avec la productivité et l’efficacité, ma fierté a un peu « pris le bord » parce que dans les faits, si je performe sous pression, c’est simplement parce que j’obéis aux lois de la productivité. 

Ces deux émotions contradictoires sont associées à des pensées qui sont négatives ou positives et c’est ça qui a une valeur plutôt que la procrastination. 

Là où la procrastination devient « mauvaise » et contre-efficace, c’est lorsqu’on l’associe à des pensées du genre : 

  • Mais pourquoi j’ai encore attendu aussi longtemps?

  • C’est sûr que j’arriverai pas à tout finir avant demain…

  • J’ai pas le temps de faire tout ça!

  • Comment je vais faire pour y arriver…

Et c’est alors qu’on essaie d’instaurer des techniques comme la technique du Pomodoro, qu’on installe des applications qui bloquent l’accès à nos réseaux sociaux pour pas se laisser distraire, etc.

Cependant, ces trucs fonctionnent à moitié…

Mais pourquoi alors ces trucs fonctionnent à moitié ?

C’est la question que j’ai fini par me poser quand je vivais ma énième frustration en constatant non seulement que je ne respectais qu’à moitié les techniques que je m’étais moi-même trouvées et imposées, mais aussi parce que j’étais tannée d’être toujours fâchée après moi-même d’avoir procrastiné.

De mon côté, j’ai identifié trois raisons qui peuvent expliquer pourquoi je procrastine.

  • Parce que la tâche est peu agréable.

Je ne me rappelle pas avoir déjà procrastiné une tâche agréable. Au contraire, je ne compte plus le nombre de fois où, plutôt que de m’installer devant mon ordinateur pour travailler, je me suis laissée distraire par mon fil d’actualité Facebook, par des stories sur Instagram, parce que je me suis dis que j’allais lire « juste une page de plus » de mon roman, etc. 

D’ailleurs, quand on procrastine une tâche, même les tâches qui, en temps normal, nous semblent peu agréables comme laver sa vaisselle ou plier son linge peuvent soudainement nous sembler plus amusantes. 

En fait, cette attitude vient d’une réaction tout ce qu’il y a de plus primaire et qui est ancrée en nous depuis des milliers d’années : la fuite. On est programmé pour éviter tout ce qui pourrait nous faire souffrir. C’est notre instinct de survie. Si tu te promènes seule dans une rue le soir et que tu passes devant une ruelle sombre, ton premier réflexe sera de te dépêcher pour passer la ruelle plutôt que de t’y aventurer.

Écrire un rapport est associé à une certaine souffrance. On sait que ça va nous prendre du temps. Ça va nous demander de la concentration, on va se poser des questions, douter de nous, on va stresser, etc. Bref, tout ça est une forme de souffrance.

Ainsi, pour éviter d’être confronté à tout ça, on repousse la tâche jusqu’à être acculé au pied du mur et à ne plus avoir le choix. 

Personnellement, à CHAQUE fois que je dois faire quelque chose qui demande d’écrire, que ce soit un rapport, le contenu d’un épisode de podcast ou encore le module d’une formation, j’ai toujours l’envie de fuir (donc de repousser la tâche) et pourtant, j’adore écrire. 

En fait, c’est que je me dis que je ne sais pas quoi écrire, que je ne sais pas si ça va être bon, que je vais peut-être avoir à tout recommencer, que ça va être long et que je suis fatiguée, etc. 

Ce sont ces pensées qui génèrent une réponse émotive et physiologique chez moi et qui me donnent envie de lutter donc de procrastiner. 

Maintenant, je ne me fais plus prendre au jeu parce que je sais que ces pensées ne sont que des croyances et qu’en les affrontant, je procrastine moins.

En ce qui concerne le sentiment de fierté que j’ai mentionné plus tôt, quand j’ai accompli sous pression une tâche pour laquelle j’ai procrastiné, je le ressens même si je fais une tâche que je n’ai pas procrastinée et non seulement je suis fière, mais souvent je suis encore plus fière parce que je n’ai pas la culpabilité qui vient avec le fait d’avoir procrastiné et je suis fière d’avoir surmonté mon premier réflexe de fuite.

  • Parce qu’on ne sait pas par où commencer.

Une autre raison pour laquelle on pourrait procrastiner, c’est parce qu’on ne sait pas par où commencer. C’est stressant de pas savoir par quoi on va commencer. 

Ainsi, on est déjà découragé avant même d’avoir commencé et on se dit « qu’on n’a pas tant de temps que ça pis qu’on a un bloc de 3 heures de libre demain fac on va être plus en forme pis on va pouvoir tout clancher d’un bout ». Ça te parle cette réflexion?

Oh que je me suis souvent tenu ce discours. Et encore aujourd’hui je te l’assure, je me fais prendre et je procrastine. 

En fait, le problème, c’est que plus on reste dans un état de statut quo (i.e. à ne pas commencer, à ne rien faire), plus on restera dans cet état. Mon truc : commencer par une petite tâche pour amorcer le mouvement. 

Par exemple, quand il est question de rédaction de rapport, j’ai décortiqué tout ce que je dois faire en sous-tâches. Alors quand ça ne me tente pas de commencer, je regarde ma liste de sous-tâches et j’en prends une qui est courte et facile. Ensuite, je tombe dans un mode « tant qu’à y’être ». Je me dis « ben là tant qu’à avoir fait cette tâche là, jvais faire celle-là » et ainsi de suite. La première chose que je sais, c’est que je suis rendue dans le flow et que j’ai fait la moitié du travail.

C’est la même chose quand je dois enregistrer un épisode de podcast. Même si j’adore ça, ça me prend souvent un petit coup de pied pour m’y mettre parce que je sais que j’en ai toujours pour au moins 2 à 4 heures de travail pour chaque épisode.

Je pourrais comparer cela aux comics dans le genre de Looney Tunes avec le Coyote et Road Runner (si tu es plus jeune, ça ne te dit peut-être pas grand chose. Ce sont des dessins animés où un Coyote essaie, par tous les moyens, d’attraper le Road Runner, mais celui-ci réussit toujours à s’en sauver).

Je me rappelle d’un épisode où le Coyote voulait faire rouler une grosse pierre pour qu’elle écrase le Road Runner lorsqu’il arriverait à sa hauteur, mais la pierre ne se mettait pas en mouvement. Quand le coyote a réussi à la mettre en mouvement, elle a accéléré lentement et s’est mise à rouler très vite. C’est un peu la même chose chaque fois que je dois me motiver. J’ai cette image en tête. Je me vois comme le coyote et j’ai cette grosse pierre à pousser (ma tâche que j’aurais donc envie de remettre à plus tard) qui finira par prendre son élan.

  • Parce qu’on se met trop de pression et qu’on a peur de ne pas réussir ou de se tromper.

La troisième et dernière raison que j’ai ciblée est reliée aux deux premières.

Dans plusieurs cas, j’ai remarqué que les tâches pour lesquelles je procrastine sont des tâches pour lesquelles je me mets passablement de la pression. Des tâches où j’ai peur de me tromper, peur de me faire juger, peur de ne pas réussir, etc. Et ce genre de peur, c’est jamais agréable à confronter. 

Quand je fais un épisode de podcast, je sais que je vais être écoutée alors je veux m’assurer que j’emploie les bons mots pour ne pas que mes paroles soient mal interprétées ou pour ne froisser personne. Parfois, quand je suis plus fatiguée et que j’ai l’impression que mes paroles sont moins fluides, cette peur prend plus de place et j’ai le goût de reporter la tâche. C’est la même chose quand je monte un module pour une formation. Chaque fois, j’ai peur et je me demande si les gens vont trouver qu’ils en ont pour leur argent, si ça va être assez clair, assez pratique et pas trop théorique, mais juste assez pour faire avancer et réfléchir le monde, etc. Toutes ces réflexions me paralysent un moment.

Quand on rédige un rapport, il y a une forme de pression qui vient avec ça. On espère que le parent ne sera pas déçu de notre conclusion. Souvent on se dit que c’est comme un point de non retour. C’est un peu comme poser une étiquette à l’enfant et on ne veut pas se tromper parce que c’est lui qui subira les conséquences de notre « erreur »! De plus, on sait qu’on risque d’être lu par d’autres professionnels qui ont peut-être (sûrement) plus d’expérience que nous et qui ont peut-être un autre regard sur la situation et qui pourraient remettre en question nos compétences professionnelles. 

La bonne nouvelle, c’est que toutes ces croyances sont souvent fausses. Ce sont des scénarios qu’on se crée nous-même, mais l’erreur est humaine. Après tout, qui ne s’est jamais trompé dans sa vie…

Ce qui m’aide quand je me mets trop de pression

Je prends toujours deux minutes pour envisager le pire scénario! Oui oui! Je me demande toujours quel serait le pire qui pourrait arriver. Dans le cas de la rédaction de rapport, le pire serait une erreur MONUMENTALE qui ferait que je serais radiée de l’ordre. Ma vie n’est pas finie. En fait, souvent ça fini en « ouin pis ». Et juste ça, ça m’aide à désamorcer parce que je réalise que le pire est toujours moins pire que je l’imagine. 

Je me demande aussi ça serait quoi pour moi d’échouer ma tâche. Souvent, je me rends compte que je n’arrive pas à y répondre parce que l’échec, c’est quelque chose d’intangible. 

Ceci dit, ces trucs, je les ai appris à travers les rencontres que j’ai faites avec ma psychologue. Parce que je suis suivie depuis plusieurs années par choix. Parce que ça me fait du bien sur tout les plans, tant personnel que professionnel. Et si je termine en disant cela, c’est parce que je sais que parfois, la procrastination peut cacher des pensées et des émotions beaucoup plus handicapantes que ce que j’ai mentionné. Si ça te paralyse, si ça te prend et que tu sens que ça vous rend infonctionnelle. Si ça affecte ta santé mentale, alors le meilleur conseil que je peux te donner est d’aller consulter un spécialiste qui pourra t’aider à y voir plus clair dans tout ça. à défaire les noeuds et à mettre le doigts sur les enjeux réels que cache ta tendance à la procrastination. 

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